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Y-a-t-il une place pour les émotions dans le recrutement ?

Le | Solutions d'évaluation

A l’heure où l’intelligence artificielle s’intègre progressivement aux process de recrutement, un recruteur peut-il encore accorder de l’importance aux émotions ou au contraire doit-il les écarter et s’appuyer uniquement sur des décisions rationnelles ? Focus sur cette problématique avec deux experts du sujet.

Y-a-t-il une place pour les émotions dans le recrutement ?
Y-a-t-il une place pour les émotions dans le recrutement ?

« Les émotions constituent tout être humain, il est donc difficile pour un recruteur de s’en départir  », rappelle Laurent Hyzy, fondateur et dirigeant de Alterconsult, cabinet de recrutement et de conseil en ressources humaines. Les émotions sont présentes à la fois dans les échanges avec les candidats, mais surtout dans le travail d’évaluation, d’analyse et de diagnostic qui va être effectué puisque l’objectif du recruteur est de voir dans quelle mesure il y a une adéquation entre un profil et un poste particulier. Incontournables, « les émotions sont aussi une source d’informations très intéressante pour le recruteur puisqu’elles sont à la fois une réaction et l’expression d’un ressenti », analyse Jean-Claude Jouanillou, directeur du cabinet de recrutement Praxion. Et d’ajouter : « Je les considère comme un atout car elles apportent une information indicible, qui n’est pas dans le paralangage et qui tient de la qualité de l’interlocuteur que l’on a en face de soi. »

La première impression : un bon outil de travail

« Je recommande souvent à mes consultants de noter leur première impression quand ils font face aux candidats, puis de voir comment elle évolue au cours de l’entretien », explique Laurent Hyzy. Ce premier sentiment est d’autant plus important lorsqu’il s’agit, par exemple, de recruter des postes de commerciaux qui sont des professionnels de la première impression et pour qui la dimension humaine, le relationnel, mais aussi l’affect sont des critères essentiels. Cette première impression est peut-être subjective et non fondée, mais elle a le mérite de s’exprimer à un instant T. « C’est un bon outil de travail dans la mesure où ces premières informations sont souvent d’une très grande qualité puisqu’elles sont sans filtres  », souligne Jean-Claude Jouanillou.

Apprendre à se connaître pour minimiser les biais

Le métier de recruteur appartient aux ressources humaines, il ne peut donc être 100 % objectif et 100 % rationnel. Dans un entretien comme dans tout échange, il existe un processus de transfert et de contre-transfert au cours duquel des émotions vont être déclenchés chez l’autre. La mission du recruteur va être de minimiser ce ressenti et de faire la part des choses entre ce qui tient à lui et ce qui tient réellement au poste. « Dans cette optique, le recruteur doit apprendre à se connaître et avoir conscience que certains biais peuvent induire des réactions qui viennent de lui et non pas forcément du candidat », conseille Laurent Hyzy. Pour contourner cet écueil, un recruteur doit être dans l’échange, réfléchir avec ses pairs, être dans l’introspection par rapport à ses réactions et son ressenti, et prendre le temps de travailler sur les feedbacks. « Au cours de l’entretien, certains ressentis peuvent être de l’ordre du plaisir et d’autres de l’agacement. Dans tous les cas, le recruteur se doit de travailler sur leurs causes », conclut-il.

Par Stéphanie Marpinard