Formation

Les MOOC tiennent-ils vraiment leur promesse ?

Le | Digital learning

Au début des années 2010, le marché de la formation a assisté à une véritable déferlante : celle des Massive Open Online Courses (MOOC). Ce format pédagogique a suscité un tel engouement - et un tel emballement médiatique - que les entreprises ont fini par le tester pour former leurs collaborateurs. Avec quel succès 

Les MOOC tiennent-ils vraiment leur promesse ? - © D.R.
Les MOOC tiennent-ils vraiment leur promesse ? - © D.R.

 ? Réponses.

Même les universités américaines Harvard, Stanford et le MIT ont succombé à la vague des MOOC ! C’est dire l’écho qu’ont rencontré ces cours en ligne lorsqu’ils sont apparus dans le paysage de la formation digitale. Voyant l’accueil que les particuliers réservaient à cette modalité d’apprentissage, les entreprises ont, elles aussi, pris part à ce mouvement de fond. Il faut dire qu’en 2010, les concepteurs de MOOC louaient leur mérite avec beaucoup de ferveur : ils vantaient notamment la possibilité, pour les entreprises, de former un grand volume de salariés, à l’échelle internationale, pour un coût très maîtrisé puisque dénué des frais relatifs aux déplacements qu’engendrent les formations en salle. Mais passé leurs premières expérimentations, les entreprises ont vite compris que les MOOC n’offraient pas autant d’avantages. « Lorsqu’ils sont apparus, les MOOC ont été présentés comme une solution miraculeuse. Ils ont cristallisé tous les besoins inassouvis en termes de formation. La promesse était sacrément lourde et il était attendu que le format des MOOC n’allait pas convenir à tout le monde », explique Yannick Petit, fondateur de Unow. Bingo : avec un taux de complétion compris entre 4 et 10 %, les MOOC ont déçu beaucoup de responsables formation.

L’accompagnement, la clé du succès 

Si certaines entreprises se sont détournées de cette modalité pédagogique pour former leurs équipes, d’autres ont simplement revu leur copie. « Nous avons d’abord lancé un MOOC à destination de nos collaborateurs sur l’acculturation au digital. S’il a fédéré plusieurs milliers de personnes, il a enregistré des taux de complétion variables en fonction de l’accompagnement de chaque entité. Nous avons finalement décidé de réserver ce format à une formation diplômante, où nous savions les apprenants véritablement engagés », raconte Pascal Mollicone, Digital Learning Manager à l’IFCAM, l’université d’entreprise du Crédit Agricole. Aujourd’hui, le groupe dispose de cinq MOOC composant le parcours de son Bachelor « Conseiller clientèle particuliers ». « Comme nous savions que l’accompagnement des apprenants avait un impact direct sur le taux de complétion du MOOC, nous avons misé sur le tutorat, l’apprentissage entre pairs, les activités à réaliser en mini-groupes, l’animation de forums… Les vidéos et les quizz seuls ne suffisent pas », précise-t-il. Aujourd’hui, 94 % des salariés suivant les MOOC du Crédit Agricole terminent le parcours de formation. « La modalité pédagogique ne nous a pas déçu. Néanmoins, contrairement à un module e-learning, un MOOC suppose une logistique lourde, ne serait-ce que pour mettre à jour les contenus, animer les forums, les webinars… »

Se former vite et mieux ?

Pour Philippe Gil, co-fondateur du cabinet de conseils IL&DI, « les MOOC ont tiré le marché de la formation vers le haut : ils ont donné leur lettre de noblesse à l’e-learning, en permettant aux salariés de se former de façon autonome et à distance. Ils ont exploité la logique de tutorat, qui est clé dans une dynamique d’apprentissage », estime-t-il. Aujourd’hui, tout porte à croire que les ingrédients du MOOC - l’auto-formation, l’accompagnement et le collaboratif - « seront l’avenir de la formation », selon lui. Le Crédit Agricole l’a bien compris : en 2019, le groupe lancera un programme d’adaptive learning pour ses MOOC. « Grâce aux 2,5 millions de datas que nous avons compilés sur les comportements des apprenants, nous allons proposer, à chacun de nos collaborateurs, une stratégie pour réussir un MOOC. Celle-ci sera élaborée en fonction de leur profil », confie Pascal Mollicone. L’enjeu ? « Se former plus efficacement, en allant à l’essentiel », précise-t-il. Aujourd’hui, très peu d’entreprises calculent le retour sur investissement de leurs MOOC, faute de trouver les bons indicateurs à suivre. Quoiqu’il en soit, « ce format pédagogique est plus efficace pour sensibiliser des salariés à un sujet d’entreprise plutôt que pour développer leurs compétences », assure Yannick Petit.

Aurélie Tachot