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« Les compétences clés du XXIe siècle ne sont pas techniques »

Le | Gpec

Dans son ouvrage « Les compétences du XXIe siècle » qui vient de paraître aux éditions Dunod, Jérémy Lamri met notre cerveau à nu ! Le futur docteur en sciences cognitives, ancien président du Lab RH, livre une analyse éclairante sur les soft skills, que l’Homme doit développer s’il veut continuer à créer de la valeur face à la technologie toute puissante

« Les compétences clés du XXIe siècle ne sont pas techniques » - © D.R.
« Les compétences clés du XXIe siècle ne sont pas techniques » - © D.R.

Interview.

Quelles sont les compétences clés du XXIe siècle ?

Ce sont celles qui permettent de résoudre des problèmes en groupe. Ces compétences ne sont donc pas techniques. Il y en a 4 principales, que l’on appelle les 4C : la créativité pour trouver des solutions, l’esprit critique pour réfléchir de manière logique, la coopération et la communication pour travailler ensemble. Il y a aussi une méta-compétence, la capacité à apprendre, qui est fondamentale.

En quoi ces compétences diffèrent-elles de celles attendues au siècle dernier ?

Ces compétences ne sont pas nouvelles ! La théorie que je porte dans l’ouvrage montre que se sont précisément ces compétences qui ont permis à l’Homme de se hisser tout en haut de la chaîne alimentaire, alors qu’il n’y était pas destiné. Au fil du temps, l’Homme a pris le dessus sur ses prédateurs car il a été capable d’utiliser son environnement à son propre compte, en se regroupant, en créant des outils et des mécanismes pour se protéger… Le XXe siècle a été marqué par l’industrie. Ce sont les compétences d’exécution et de reproduction qui étaient principalement valorisées. Dans notre économie d’aujourd’hui, toutes les tâches simples et répétitives peuvent être effectuées par des machines. Les 4C redeviennent donc centrales car la technologie, qui sait faire beaucoup de choses mieux que nous, apparaît comme un nouveau prédateur. Petit à petit, nous perdons notre utilité et avons donc besoin de nous adapter à ce nouvel environnement.

Comment le recruteur peut-il identifier et évaluer ces compétences ?

C’est le drame de notre époque. Les recruteurs veulent des collaborateurs performants et capables de s’adapter mais les outils de mesure du cognitif sont quasi inexistants en entreprise. Il existe pourtant des batteries de tests cognitifs, mais ils sont réservés aux recrutements très coûteux. Ces outils méritent d’être repensés et démocratisés.

Ces compétences sont-elles innées ou peut-on les développer ?

Dans les sciences cognitives, la dimension génétique pèse moins de 5 %. Tout le monde a la capacité de développer ces compétences à un stade très élevé, mais cela se joue en partie pendant l’enfance et l’adolescence. Du côté de l’entreprise, on ne développe pas les 4C de ses collaborateurs en les envoyant dans une salle de formation ou en leur demandant de suivre un MOOC. Les individus peuvent apprendre à s’adapter et à réfléchir, à condition d’être confronté au sujet : il faut se mettre en situation, sortir de sa zone de confort. Au quotidien, on est en mode automatique ; on utilise plutôt la partie arrière de notre cerveau, le lobe pariétal, qui gère les habitudes et les réflexes. Quand il se passe un événement inhabituel, on doit réfléchir. C’est alors la zone frontale du cerveau, en charge de l’adaptation, qui est principalement activée. Pour développer les 4C, il faut provoquer cette « bascule préfrontale » !

Gaëlle Fillion